« Les liaisons dangereuses » de Choderlos de Laclos

Voilà un livre que j’avais envie de lire depuis longtemps ! J’aurais dû m’y plonger durant le premier semestre, puisqu’il s’agissait d’une des lectures prévues pour le club de lecture auquel je participe, mais avec mes SPs le timing était trop serré. Et c’est Aaliz qui m’a donné l’occasion d’une seconde chance en prévoyant une lecture commune sur Livraddict.

Je suis légèrement en retard, la LC était prévue pour le 25 août…

Mais je l’ai lu, et c’est l’essentiel 🙂

Résumé : La jeune Cécile Volanges quitte son couvent pour faire l’apprentissage du monde et épouser le comte de Gercourt, mais une de ses parentes, la marquise de Merteuil, entend profiter de ce projet de mariage pour se venger d’une infidélité que lui a faite autrefois Gercourt. Elle charge donc son complice, le vicomte de Valmont, de pervertir Cécile avant ses noces. Mais loin de Paris, dans le château de sa vieille tante, Valmont s’est de son côté mis en tête de séduire la dévote présidente de Tourvel, et une idylle bientôt se noue entre la « petite Volanges » et le jeune Danceny.

Mon avis : coup de coeur !

Il a déjà été tant dit de ce roman qu’il m’est difficile de m’y mettre à mon tour. Je serai donc relativement brève. Pourquoi Les liaisons dangereuses est-il un coup de coeur ?

1) Parce que je suis très fan des romans épistolaires. Il n’y a pas de tricherie possible, nous avons les relations des personnages entre eux à l’état brut. Nous avons accès à leurs pensées direct, et à celles qu’ils veulent bien transmettre à leurs destinataires. Et ce qui est particulièrement intéressant c’est d’essayer de lire entre les lignes, de déjouer la manipulation, les non-dits. Dans ce roman c’est éloquent, tout repose sur la manipulation des mots.

2) Pour l’écriture. Que ça fait du bien de lire un roman vraiment bien écrit ! Une syntaxe maîtrisée à la perfection, un vocabulaire minutieux, et des tournures de phrases à faire pâlir les romanciers bankables de notre génération. J’ai pris plaisir à lire à voix haute certains passages tant ce texte met en valeur les subtilités de notre belle langue. Et quel esprit !

3) Pour l’histoire évidemment. Ces chassés croisés amoureux sont passionnants à suivre. Non pas pour l’amour en lui-même mais pour la façon dont chacun se sert des autres pour arriver à ses fins. Entre Valmont qui joue avec la présidente de Tourvel pour l’attirer dans ses filets, et la marquise de Merteuil qui se sert de Valmont pour faire tomber à l’eau le mariage de son ancien amant, qui doit par ailleurs épouser la fille d’une de ses bonnes amies, il n’y en a pas un pour rattraper l’autre. Ces personnages n’ont aucun scrupule, la fin justifie les moyens. Ils sont sournois, perfides, cyniques, et j’adore. Et la façon dont ils arrivent à pervertir les âmes qu’on croyait innocentes force mon admiration.

4) Pour le duo Valmont-Merteuil. C’est un pur bonheur de lire leurs échanges. « Je t’aime, moi non plus ». Leur relation est fondée sur un respect mutuel teinté de crainte. Tous deux très malins,   chacun sait qu’il vaut mieux ne pas se mettre son correspondant à dos sous peine d’en pâtir lourdement. Leurs lettres sont vraiment intéressantes tant pour l’intrigue que pour l’usage de la langue, en disant les choses sans les dire, avec beaucoup de sous-entendus. Ce sont les échanges que j’ai préférés lire.

5) Pour l’esprit. Les romans où tout le monde est beau tout le monde est gentil ne m’intéressent pas. Les personnages les plus intéressants sont les plus sournois, ceux qui sont entiers et ne se plient pas à la volonté des autres. J’ai aimé cette idée que chacun cherche à obtenir ce qu’il veut, quitte à en subir les conséquences. Et à l’époque de Rousseau et de son « L’homme est naturellement bon » etc, Les liaisons dangereuses viennent équilibrer la balance.

6) Pour l’époque. J’aime beaucoup les romans qui se passent dans le passé, et avec l’aristocratie du 18è il y a de quoi faire. Cela me plait d’être plongée dans un monde si éloigné du mien, où on s’écrit de longues lettres, où l’on ne sait ce qui se passe ailleurs que deux jours plus tard. Un monde où il y a des boudoirs, des dîners mondains, des codes sociaux totalement différents des nôtres.

J’avais vu le film de Stephen Frears lorsque j’étais ado, et après avoir lu le roman j’ai une furieuse envie de le revoir. Ni une ni deux, commandé et reçu ce matin !

Remarque : je possède une édition avec des notes en fin d’ouvrage. Page 12, j’apprends en lisant la première note un élément important qui n’interviendra qu’à la fin du roman. Moralité : méfiez-vous des notes !

Livre lu avec :

Aaliz, Chinouk, PetiteMarie, Elizabeth, Salsera15, Antomilna, TetedeLitote, misslecturedu78, Hopeee, Clairdelunebleu, Nefertari (je ne suis pas la plus en retard hi hi)

Le Livre de Poche, 1993, ISBN 978-2-2530040-1, 585 pages

49 réflexions au sujet de « « Les liaisons dangereuses » de Choderlos de Laclos »

  1. Je suis vraiment RAVIE que tu aies autant aimé ce chef-d’œuvre ! Je ne sais rien dire de plus que ce que tu n’as déjà dit (à part pinailler sur un ou deux détails, mais je m’abstiendrai cette fois ^^), ce roman est génialissime pour toutes ces raisons !

      1. Promis, je vais essayer de surveiller ce que je dis cette fois. :$
        C’est pour le « je t’aime moi non plus » : l’idée d’amour entre eux est plus présente dans le film de Frears que dans le roman de Laclos d’après moi. (je ne dis rien de plus ;)) Et pour le contrepoint à Rousseau : Les Liaisons s’inscrivent dans le courant du libertinage des roués en effet bien différent du monde idéal de Rousseau, MAIS déconstruisent aussi tout l’édifice du roman libertin ! Et Laclos est affreusement rousseauiste (affreusement, parce que je fais une overdose de Rousseau depuis quelques mois). C’est assez flagrant dans un de ses essais. Dans Les Liaisons, ça se voit par exemple dans la figure de la Marquise et son éducation (sauf qu’elle pousse ce système éducatif à l’extrême et le pervertit)
        Voilà, j’ai fini de pinailler, j’espère ne pas avoir spoilé cette fois, supprime mon commentaire si nécessaire. 😉

        1. Tu as bien fait d’approfondir la discussion !
          Pour la question de l’amour entre Valmont et Merteuil je trouve vraiment qu’il y a un jeu amoureux à travers leurs lettres, à voir si Frears en a rajouté une couche, je pense regarder le film cette semaine. Et je suis d’accord pour ce que tu dis de Rousseau, je vois très bien de quoi tu parles. J’abordais plutôt l’angle de la nature humaine que celui de l’éducation mais ton comm apporte un éclairage intéressant 🙂

  2. Je suis contente que tu aies autant aimé et ton billet est vraiment très bon. Comme Minou, je trouve aussi que ce roman donne raison à Rousseau, l’homme est naturellement bon mais la société le corrompt et on en a la brillante démonstration ici, cette société avec toutes ses obligations, ses devoirs dus au rang que l’on doit tenir et qui finalement poussent à vouloir les contourner quitte à utiliser les moyens les plus pervers. C’est ce que fait particulièrement Merteuil, elle qui refuse de se plier à sa condition.
    En tout cas, merci beaucoup pour ta participation !

    1. Mais pourquoi ton comm était-il dans les indésirables, quelle idée ??
      Merci de ton passage ici 🙂 Je déclare forfait pour Rousseau, même si pour moi Valmont et Merteuil sont de viles créatures même sans les contraintes de la société. Et c’est pour ça que je les aime tant ces personnages ^^ Mais vos arguments tiennent la route sans problème 🙂
      Merci beaucoup d’avoir organisé cette LC !!
      A bientôt Aaliz

    1. Et c’est pourtant possible 😉
      Je ne dirais pas que j’ai détesté, mais je n’ai pas réussi à finir. Certes, il est superbement écrit, mais alors que j’adore les romans épistolaire, j’ai eu énormément de mal à me faire au style de certaines lettres, aux lenteurs dans d’autres… Dommage, l’intrigue me plaisait mais tout ça m’a coupé l’envie de continuer.

  3. Lu et relu! j’aime ce livre! Un vrai plaisir de le parcourir à chaque fois!!
    je suis contente que tu es eu un coup de cœur pour un de mes coups de cœur!! 😀

  4. Je dois être encore une des rares à ne pas l’avoir lu mais cela fait déjà un moment que je lorgne dessus… Ton avis, me donne envie de le lire encore plus ! Je crois qu’il ne va pas tarder à rejoindre ma PAL !

  5. Beau billet, et je confirme, ce roman est une pure merveille. Lu 4 fois et regardé aussi souvent le film… It is just beyond my control !

  6. A lire pour moi, j’ai vu le film il y a des années. Je pensais le faire dans le cadre du challenge de Minou (libertinage). Merci pour ton billet 🙂

        1. Je l’avais déjà vu ado et j’avais adoré. Mais avec quelques années de plus je pense que ce sera encore plus savoureux 😉

  7. J’avoue que je n’ai pas lu les notes et le « dossier », j’étais assez en retard comme ça pour cette LC !
    Contente que tu aies eu un coup de coeur et déçue de ne pas l’avoir partagé…
    Tu parles des chassés-croisés amoureux mais je trouve énormément dommage que le tout soit faussé par la manipulation (même la relation Cécile de Volange – Danceny vu que parfois on leur conseille ou même dicte ce qu’ils doivent mettre dans leurs lettres) et la morale qu’on pourrait tirer c’est que oui, la fin justifie les moyens et que se laisser aller à aimer vraiment ne peut nous apporter que du malheur (Mme de Tourvel en particulier…).

  8. Quel plaisir de te lire sur ce titre qui a marqué mon mois de novembre (et mon année) !

    Par contre, c’est amusant, tu dis qu’il n’y a pas de tricherie possible, alors que je pense qu’il y a beaucoup de tricheries dans cette histoire et dans ce genre. Le format même en est déjà une, à vouloir faire passer la fiction pour des lettres réelles, un jeu avec lequel joue l’auteur d’ailleurs dans ses deux préfaces. Et puis ensuite, Merteuil ou Valmont se dissimulent dans leurs lettres, ils n’avouent jamais franchement leurs sentiments, pas sans les moquer en tout cas. Même Mme de Tourvel ne dit pas forcément toute la vérité. Il n’y a peut-être que Cécile qui se livre entièrement et naïvement, dans la lecture que j’en ai faite en tout cas (qui n’en est qu’une parmi d’autres).
    Je te rejoins totalement sur l’écriture !

    Même si nos lectures diffèrent parfois, te lire est un plaisir qui fait revivre cette lecture.

    J’ai découvert le film de Frears cette semaine. C’était intéressant… Il y a toujours le côté un peu décevant de l’adaptation qui oublie des choses, mais de voir les personnages et de ne plus les lire apporte une lecture différente, où les sentiments sont à mon avis beaucoup moins dissimulés.
    Au plaisir d’en reparler quand tu l’auras revu !

A vous les micros !