« Les éclats » de Bret Easton Ellis

Dans cette autobiographie fictive, Bret Easton Ellis revient sur ses dix-sept ans. Il est alors en terminale au lycée de Buckley, à Los Angeles, et nous sommes en 1981. Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Il est bon élève, est le meilleur ami du couple le plus populaire de l’établissement, a une petite amie dont le père est richissime. Bret lui-même appartient à la jeunesse dorée de la upper-class américaine. Tous ses amis évoluent dans l’abondance et affichent très naturellement la panoplie des signes extérieurs de richesse. A dix-sept ans, ils se rendent au lycée dans des voitures prestigieuses, organisent des fêtes où alcools et surtout drogues sont disponibles à profusion, dînent dans des restaurants huppés… Et il n’est pas rare de tomber sur une star ou deux chez Debbie, la petite amie de Bret. Bref, tout roule pour ces jeunes qui se préparent à intégrer l’université.

Mais si Bret expose dès le début qu’il lui a fallu quarante ans avant d’oser raconter ce qu’il s’est passé cette année-là, c’est que quelque chose de terrible s’est produit. Et qu’il reste persuadé que c’est le nouvel élève, Robert Mallory, arrivé en cours d’année, qui est la cause de tout. Lui qui a distillé le poison dans la pomme d’amour sucrée et brillante qu’était le groupe d’amis de Bret.
Au même moment, un autre évènement bouleversait la quiétude californienne. Un tueur en série semait la panique, s’en prenant à des jeunes du même âge que Bret. Le lycéen gardait son insouciance jusqu’à ce que ce soit quelqu’un de son entourage proche qui soit pris pour cible.

Voici en quelques mots le résumé qu’on peut faire de ce roman qui va se déployer sur 912 pages sans qu’à aucun moment ne pointe l’ennui. Bret Easton Ellis nous offre une œuvre magistrale, une véritable leçon de littérature, en nous plongeant intégralement dans le Los Angeles bling bling des années 80. Avec force détails, notamment musicaux et culturels, il parvient à restituer tout un décor qui se déploie sous nos yeux et dans lequel on évolue au côté des personnages, tant et si bien qu’il est parfois difficile de retourner à la réalité après avoir absorbé plusieurs pages.

L’histoire est sensationnelle. Les éclats porte une tension dramatique intense, dans laquelle on se coule avec délectation. On a envie de savoir, on avale les pages sans s’arrêter, redoutant en même temps la dernière tant on ne veut plus quitter le roman. Le suspense est impeccablement maîtrisé, avec des périodes d’accalmie avant un rebondissement spectaculaire, qui nous pousse à continuer encore et encore.

Et il y aussi ce personnage central, Bret, homosexuel non assumé puisqu’il utilise Debbie comme alibi. Comme tout jeune de dix-sept ans, ses pensées et pulsions sont hautement sexualisées. Bien que ce soit un secret, il parvient à entretenir des relations charnelles sur lesquelles l’auteur n’a aucun tabou. Cette transparence totale et sans pudeur sur ce qu’il se passe dans la vie et dans la tête de Bret est cruciale pour nous approcher de la réalité de ce personnage qui est le seul point de vue auquel nous avons accès pour essayer de comprendre ce qu’il se passe pendant cette année fatidique.

Ce roman sans conteste un chef d’oeuvre, à tous points de vue. Un roman de 912 pages qu’on a déjà envie de relire ne peut être qualifié autrement. Du grand, grand art.

2 réflexions au sujet de « « Les éclats » de Bret Easton Ellis »

  1. Bonsoir,

    Oui, une très belle approche de ce livre. Comme d’habitude !

    Je ne l’ai pas encore lu : je viens juste de l ‘acheter.

    Un des rares auteurs contemporains que je suis de près.

    Merci pour ce post

A vous les micros !